TOUT EST DIT

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mercredi 24 novembre 2010

Fillon veut concilier réforme et rigueur



Fillon a présenté son programme aux députés



Succès des Beatles sur iTunes



Off

« Off the record ». Voilà une expression qui s’est beaucoup répandue ces dernières heures dans la presse, sur les ondes et sur la Toile. La profession des journalistes sait très bien de quoi il s’agit mais le grand public beaucoup moins et ce hiatus doit nous interroger à notre tour. Traduction approximative du « off the record » : on n’enregistre pas, et donc les propos que je vous tiens ne sont pas destinés à être reproduits, du moins pas avec ma signature, celle de « ma source ».

C’est une petite cuisine dont le métier s’est longtemps accommodé et qui peut encore s’accepter quand il s’agit d’un informateur qu’il ne faut pas compromettre. Mais pas quand il s’agit d’un président de la République ; sa parole, par nature, a du poids et, même quand il fait du second degré avec un journaliste en le menaçant de le traiter de pédophile, il faut le dire. Le public a suffisamment de bon sens pour se forger son propre jugement. 
Ce que le magnétophone n’enregistre pas, le cerveau le fait très bien pour lui.

DSK en route pour sa candidature

A l’époque où l’URSS existait encore, les experts qui auscultaient le malade et guettaient le moindre signe étaient qualifiés de kremlinologues. Dans la politique française d’aujourd’hui, il existe des experts aussi avertis que l’on pourrait appeler les DSKanologues, ceux qui étudient et interprètent le moindre indice concernant une éventuelle candidature du directeur du FMI à la prochaine élection présidentielle ! Après les quelques jours que DSK vient de passer à Paris pour s’entretenir officiellement avec Nicolas Sarkozy à l’Elysée, les DSKanalogues sont à peu près unanimes pour conclure qu’il ira, qu’il sera candidat en 2012, et qu’il le fera savoir à sa manière au cours du premier trimestre 2011.

Sur quoi se basent nos experts ? Sur un certain nombre de faits en apparence anodins, comme son régime pour mincir révélé par l’hebdomadaire américain Newsweek, et sur une phrase de son épouse, Anne Sinclair, lors de son passage à Canal+ : « Il faut être tordu pour dire que Dominique n’est pas de gauche. »

Cette réaffirmation de l’appartenance de DSK à la famille de gauche et le rappel de son passé d’élu socialiste et de ministre de Pierre Bérégovoy et Lionel Jospin ne sont pas dus au hasard. D’autant que cette appartenance à la gauche a été réaffirmée par DSK en personne dans une mise au point au Figaro très révélatrice : devant des banquiers allemands réunis à Francfort le 19 novembre, M. Strauss-Kahn avait évoqué le choix social de certains Européens de travailler moins et de perdre du revenu et cela était apparu comme une critique de cette attitude. DSK a aussitôt rectifié en assurant au journal « qu’un tel choix peut-être justifié par des préférences collectives légitimes, car l’accomplissement personnel ne se résume pas au revenu ». Le directeur général du FMI revient ainsi à ses racines car il fut sous le gouvernement Jospin le coauteur des 35 heures avec Martine Aubry.

S’il prend aujourd’hui le plus grand soin de se présenter comme une sorte de leader de la gauche mondiale et de la régulation du capitalisme, c’est qu’il s’apprête à être candidat, d’où le dicton actuel au Parti socialiste : « Si DSK ne dit pas non en mars, c’est qu’il dira oui en juin. »

Attentat de Karachi – Giscard s'invite dans le débat

Valéry Giscard d'Estaing a affirmé mardi sur Public Sénat qu'il « existait une liste des rétrocommissions » relative à la vente d'armes par la France au Pakistan.


Invité mardi de l'émission Bibliothèque Médicis, sur Public Sénat, Valéry Giscard d'Estaing était interrogé sur d'éventuelles rétrocommissions ayant accompagné la vente de sous-marins au Pakistan. Pour l'ancien président de la République, cela ne fait aucune doute : il « existait une liste des rétrocommissions » relative à la vente d'armes par la France au Pakistan.
« La question qu'il faut poser, c'est: il (l'argent) revient pour qui et pour quelles raisons », a déclaré VGE avant d'expliquer: « la commission, c'est pour vendre, la rétrocommission ce n'est pas pour vendre ». Les rétrocommissions, « c'est un scandale », a-t-il dit. 
Comme on lui demandait s'il savait si des rétrocommissions existaient, il a répondu: « elle existe cette liste des rétrocommission puisqu'on la protège avec le secret défense ». « Si elle n'existait pas, on n'aurait pas besoin de la protéger, a argumenté Valéry Giscard d'Estaing. Cela n'a rien à voir avec le secret défense », a ajouté l'ancien chef de l'Etat, qui a affirmé ne pas savoir où était cette liste de rétrocommissions.
De fait, la justice soupçonne qu'une partie des commissions versées dans le cadre de cette vente soit revenue en France pour financer la campagne présidentielle d'Edouard Balladur, dont Nicolas Sarkozy était le porte-parole en 1995. Par ailleurs, la justice enquête sur les conditions dans lesquelles onze Français ont été tués en 2002 dans un attentat à Karachi. Parmi les hypothèses évoquées figure l'arrêt du versement des commissions liées à ce contrat et décidé par Jacques Chirac, alors président. Mais aucune preuve ne vient l'étayer.

IL COMMENCE À ME GONFLER CE VIEUX CROUTON  SÉNILE ET LUBRIQUE, IL Y A DES MOMENTS OÙ IL DEVRAIT FERMER SON CLAQUE-MERDE !!
ET CONTINUER À SE TRIPOTER EN RÊVANT DE DIANA

François Fillon : «L'élan de la réforme est intact»

Dix jours après le remaniement gouvernemental, François Fillon a présenté mercredi devant le Parlement les priorités de son gouvernement. Assumant le bilan de la première moitié du quinquennat, il promet de continuer à réformer et de ne pas augmenter les impôts.

Dix jours après le remaniement gouvernemental, François Fillon, reconduit à Matignon par Nicolas Sarkozy, a présenté mercredi devant le Parlement les priorités de son gouvernement dans son discours de politique générale. Le premier ministre a été longuement applaudi à son arrivée dans l'hémicycle. Voici les principaux points de son discours , qui a duré 47 minutes:

• Les réformes - François Fillon a débuté son discours en rappelant que «l'élan de réforme» du gouvernement est intact. «Mon gouvernement d'action a un double mandat. Bâtir une France moderne et gérer la pire crise économique depuis la crise de 1930». «De quoi pourrions-nous rougir ? D'avoir réformé les universités ? D'avoir instauré le service minimum ? D'avoir réussi le Grenelle de l'environnement ? J'assume notre bilan», a expliqué le premier ministre.
Affirmant que lorsqu'on «sert l'intérêt général, on ne s'excuse pas pour son courage», François Fillon, qui avait placé sa reconduction à Matignon sous le signe de la continuité, a lancé : «Contre vents et marées, dans le calme et la tempête, contre les conservatismes et pour vaincre les peurs, l'élan de la réforme est intact!». Avant d'assurer, en parlant des «échéances électorales à venir», «l'impopularité d'un jour peut devenir l'estime du lendemain».

• Une règle constitutionnelle sur les déficits - La lutte contre les déficits est la priorité des priorités pour François Fillon. Il veut même faire de l'équilibre des finances publiques un principe constitutionnel. Le chef du gouvernement saisira prochainement «les groupes politiques d'un document d'orientation afin que nous voyions ensemble si un consensus peut être atteint sur cette question».
La France s'est engagée devant ses partenaires européens à réduire son déficit public de 7,7% du PIB cette année à 6% fin 2011, jusqu'à 2% fin 2014. «La crise du surendettement n'est pas jugulée», assure-t-il. «Avec une dette de 1600 milliards d'euros, la France ne dispose pas de trésor caché pour se dispenser de ces efforts», a-t-il ironisé. «Il faut nous libérer des déficits pour maintenir les taux d'intérêts à un niveau aussi bas que possible et pour retrouver des marges de manoeuvre», a-t-il souligné.
Le chef du gouverment a défendu la rigueur budgétaire. Il n'y aura pas de dépenses publiques supplémentaires pour relancer la croissance, ni hausse d'impôt, a promis François Fillon. Le premier ministre s'est en revanche prononcé en faveur d'une réorientation de l'épargne vers le financement de long terme des entreprises, notamment en actions.
• La croissance économique - François Fillon a reconnu que «la reprise est amorcée», mais que «la crise n'est pas finie».«L'Europe est menacée de stagnation», a-t-il ajouté. Mais le premier ministre a aussi dit s'attendre à une croissance «supérieure à 1,5%» en 2010 et a jugé la prévision d'une croissance à 2% l'an prochain «à la portée» de l'économie française.
La France va proposer, «au sein de l'Union européenne», «la création d'un fonds européen de capital risque en faveur des entreprises innovantes». En plus de ce fonds, la France proposera la création d'un «fonds européen des brevets pour valoriser les résultats de la recherche».
• La réforme de la fiscalité - François Fillon s'est engagé à mener à bien «une réforme profonde de la fiscalité du patrimoine» avant l'été prochain, qui pourrait aboutir à une suppression du bouclier fiscal et de l'Impôt sur la fortune (ISF). Il a prévenu qu'elle devrait se faire «à produit constant» pour «stabiliser» la dette publique dans deux ans.
Mais il n'y aura pas de nouvelle hausse d'impôt, a-t-il aussi promis. Avant d'ajouter: «le statu quo n'est pas possible». Selon lui, la fiscalité française est «un chef d'oeuvre de complexité, au point d'en affecter l'efficacité et même l'équité». Sa réforme doit donc «servir notre compétitivité», «rechercher la justice» et la rendre plus «lisible» et «aussi simple que possible».
• La réduction du chômage
- Devant les députés, le chef du gouvernement a réaffirmé la priorité donnée à la lutte contre le chômage, citant notamment l'objectif d'un doublement du nombre de jeunes en alternance «en engageant un dialogue constructif avec les régions». Le premier ministre veut aussi généraliser les contrats de transition professionnelle pour favoriser la reconversion des salariés qui ont connu un licenciement économique. «Nous devons aujourd'hui relancer nos politiques de l'emploi et progresser dans la voie de la flexisécurité», a-t-il ajouté, jugeant qu'il revenait aux partenaires sociaux «d'en proposer et d'en définir les modalités et les outils».
• La réforme de la dépendance - C'est aussi l'une des priorités de la feuille de route gouvernementale. Le premier ministre a confirmé l'intention du gouvernement de mener en 2011 une concertation nationale sur ce dossier. Cette concertation aura notamment pour objectif d'étudier «sans a priori ni préjugé» les pistes de financement - assurance obligatoire ou facultative, collective ou individuelle.
Il a indiqué que cette concertation serait élargie à toute la protection sociale, citant notamment la régulation des dépenses de santé. Elle devra aussi «examiner les voies et le moyens de réguler les dépenses de santé, de fixer la part des régimes obligatoires et complémentaires, et de diversifier les modes de financement», a-t-il ajouté.
Le coût de la dépendance «est estimé à 22 milliards d'euros (par an) et il devrait atteindre les 30 milliards dans les prochaines années», a fait valoir François Fillon, selon qui le nombre des plus de 75 ans devrait doubler dans les prochaines décennies en France.
• La politique internationale de la France - La France assume «son message universaliste», «par la diplomatie, mais aussi par la force des armes quand cela est nécessaire», a-t-il déclaré. Elle «va se battre pour convaincre ses partenaires qu'un monde mieux équilibré et mieux régulé est nécessaire».
«Le sort de nos otages nous mobilise inlassablement. Au terrorisme nous opposons une vigilance permanente et la force de caractère de la République», a souligné le premier ministre. «En Afghanistan, nous poursuivrons notre stratégie de sécurisation, de reconstruction et de responsabilisation des autorités afghanes», a-t-il poursuivi.
La réforme de la justice Nicolas Sarkozy avait relancé, lors de son intervention télévisée du 16 novembre, l'idée d'introduire des jurés populaires en correctionnelle et d'adjoindre des «citoyens» aux juges pour prendre les décisions de libérations conditionnelles. François Fillon a énuméré les questions à définir en vue de cette réforme : «Quels délits peuvent donner lieu à des formations de jugement impliquant la participation d'assesseurs issus de la société civile? Faut-il envisager un seuil de gravité ? Est-ce en première instance ou seulement en appel?».
Il a ajouté un nouveau thème de réflexion : «Ne faut-il pas aussi réfléchir au fonctionnement des assises?», s'est interrogé le premier ministre. «Est-il nécessaire d'avoir toujours neuf jurés, ou bien peut-on dans les cas les moins graves trouver une forme de participation populaire moins lourde?».
François Fillon a assuré que la réforme de la justice n'était pas motivée par une «méfiance à l'égard des magistrats dont le professionnalisme et la haute conscience méritent notre respect». Le nouveau ministre de la Justice, Michel Mercier, ouvrira «un large débat pour savoir comment renforcer le lien entre le peuple souverain et sa justice pénale», a déclaré le chef du gouvernement.


Et maintenant, au tour des Portugais

L’Irlande désormais dotée d’un plan d’aide financière, le Portugal attend de savoir si les marchés vont desserrer leur pression. Mais pour cela, prévient le quotidien Público, il faudra en passer par la rigueur. 

Au lendemain de l'annonce confirmant le recours de l'Irlande à l'aide de l'Union européenne et du Fonds monétaire international, le pays s'est penché sur les marchés comme sur une boule de cristal devant lui révéler son avenir à court terme. Or, contrairement aux attentes, les signaux que constituent les taux d'intérêt sur la dette publique ou les indices des contrats d'assurance exprimant le risque souverain (les fameux credit default swaps, ou CDS) étaient contradictoires.
Le Portugal, selon les indicateurs d'hier, n'est pas condamné dans l'immédiat à un sauvetage extérieur, mais on est encore bien loin de pouvoir affirmer, après l'assistance à l'Irlande, que la pression est retombée et que le pays n'a besoin de l'aide de personne.
Dans un contexte aussi incertain et précaire, chaque mot prononcé et chaque signal envoyé par les décideurs politiques et économiques influent sur les événements à venir. Plus encore, il faut à tout prix éviter d'en arriver à des comptes-rendus sur l'exécution du budget comme il en été donné hier [malgré deux plans d'austérité, le budget portugais a été exécuté selon la loi de finances initiale].
En d'autres termes, le Portugal ne peut espérer se libérer de la pression des marchés tant qu'il n'affichera pas une politique financière crédible. Si l'état actuel du déficit ou de la dette publique peut conduire l'ancien ministre socialiste António Vitorino à déclarer que “selon une lecture rationnelle, le maintien des pressions sur le Portugal n'a aucun sens”, la capacité de l'Etat à mener une politique rigoureuse exige à l'avenir plus de prudence et de circonspection.
Quand bien même le pays parviendrait à sortir indemne de l'actuelle tempête sur les marchés, les doutes sur ses capacités de paiement à ses créanciers ne se dissiperont pas pour autant. Et si à court terme, il se confirme que le gouvernement est toujours incapable de contrôler les dépenses de l'Etat, les pressions ne manqueront pas de réapparaître, et avec elles la perspective d'une punition de l'UE et du FMI.

Les deux visages du capitalisme européen

L’économie de marché règne aujourd’hui sur tout le continent. Mais est-elle la même partout ? Car à l’Est, les capitalistes ont prospéré sur le féodalisme post-communiste et ont ainsi créé un système bien particulier. 

"Nous sommes coincés quelque part au milieu de la transition de l’économie planifiée vers l’économie de marché. Nous avons créé un hybride de ces deux systèmes", déclarait l’ancien président russe Boris Eltsine il y a quelques années. Quelle sorte de capitalisme construisons-nous en Roumanie, et plus généralement à l’Est de l’Europe, et en quoi se différencie-t-il du capitalisme occidental ?
Tout d’abord, en Roumanie, comme dans toute la région, nous avons affaire à un "capitalisme sans capitalistes", comme le remarquaient Gil Eyal, Ivan Szelenyi et Eleanor R. Townsley dans un ouvrage collectif.
Au lendemain de la chute des régimes communistes nous avons été contraints de construire un capitalisme sans classe de propriétaires et détenteurs du capital qui puisse jouer le rôle que la bourgeoisie a tenu lors de la naissance du capitalisme.
Bien sûr, nos capitalistes ont poussé comme des champignons, et les nouveaux riches sont apparus du jour au lendemain. Mais entre les capitalistes occidentaux et nos capitalistes sortis du néant, il y a une différence comme entre le jour et la nuit.

Le capitalisme est-européen ressemble au communisme

La circonstance qui a permis l’apparition et le développement du capitalisme a été la victoire obtenue par la bourgeoisie dans la légitimation de son capital économico-financier face au capital social détenu exclusivement par l’aristocratie. Dans le féodalisme, les privilèges et le rang attiraient le capital économique ; dans le capitalisme, l’équation s’est inversée et l’argent est devenu la source de la position sociale, des privilèges et du pouvoir.
En Europe orientale, et en Roumanie en particulier, nos capitalistes ont usé de leur capital social pour obtenir du capital économique. Les technocrates de l’ancien régime, proches d’une façon ou d’une autre des structures de pouvoir étatiques, ont utilisé leur réseau social pour obtenir des usines, des contrats et d’autres biens qui ont rapidement contribué à l’apparition des capitalistes autochtones.
La prédominance du capital social est un trait spécifique du féodalisme, mais aussi du communisme est-européen, où le capital politique n’était qu’une variation du capital social. De ce point de vue, notre capitalisme est pré-moderne, car il obéit à des règles féodales. La logique institutionnelle a été et continue d’être subordonnée à la logique relationnelle, et les institutions sont devenues des organismes kafkaïens au service des favoritismes.

Une forme dégénérée du capitalisme "authentique" ?

Une autre particularité du capitalisme est-européen est le fait qu’il ne constitue pas le résultat d’une évolution organique, mais qu’il est le produit d’un projet. De ce point de vue, il ressemble au communisme : il contient tous les éléments d’ingénierie sociale, parmi lesquels les tentations utopiques et la justification du présent en invoquant l’avenir. Notre capitalisme s’est forgé sur la restructuration fondamentale des institutions économiques de haut en bas, tout l’inverse de son équivalent ouest-européen.
Ces 10 dernières années, l’utopie qui tarde à se réaliser et les plaies sociales engendrées par les efforts pour la construction du capitalisme ont contribué à faire considérablement baisser la confiance de la population locale dans l’économie de marché.
En Hongrie, par exemple, la confiance dans le capitalisme est passée de 80% en 1991 à 46% en 2009, en Bulgarie de 73 à 53%, en Lituanie de 76 à 50%. Cette chute vertigineuse a transformé l’Europe orientale en l’une des régions où le niveau de sympathie envers l’économie de marché est le plus bas : en 2007, avant la crise économique, il était de 56%, seulement un pourcent de plus qu’en Amérique latine, (55%), loin derrière l’Afrique (75%), l’Asie (72%), l’Amérique du Nord (70%) ou l’Europe de l’Ouest (69%).

"Le racket légitime organisé par la classe dominante"

En fait, la question qu’on doit se poser est de savoir si le capitalisme est-européen est en effet une forme dégénérée du capitalisme "authentique", ou s’il s’agit tout simplement d’un autre genre de capitalisme. Des sociologues comme Karl Marx ou Max Weber pensaient que le capitalisme avait une seule finalité. Mais leurs théories ont été élaborées avant que le capitalisme ne se développe mondialement.
L’histoire récente nous montre qu’il y a une multitude de capitalismes : du modèle chinois, qui coexiste très bien avec un régime autoritaire, jusqu’au capitalisme nord-américain, en passant par le modèle est-européen. Ce dernier est lui-même un concept qui n’arrive pas à rendre compte de la complexité des phénomènes qu’il prétend décrire. Peut-on confondre le capitalisme russe avec le roumain ou le tchèque ?
Il se peut que l’hypothèse selon laquelle le capitalisme est incompatible avec le manque de liberté (le cas de la Chine) ou avec la domination du capital social par rapport au capital économique (comme en Roumanie) soit fausse. Le capitalisme pourrait ne pas nécessairement aboutir à une démocratie, ne pas nécessairement générer la prospérité, et il pourrait même très bien coexister avec des systèmes clientélistes ou mafieux.
Après tout, le capitalisme occidental ne pourrait-il pas être juste une forme particulière d’un système économique que nous appelons génériquement capitalisme, et dont la caractéristique principale n’est ni la suprématie de l’argent, ni le triomphe de l’institutionnalisme sur le favoritisme, mais tout simplement, comme disait Al Capone, "le racket légitime organisé par la classe dominante".

Le parfum de sang de l'affaire Karachi

Selon Christophe Barbier, la France doit aux victimes de l'attentat de Karachi une justice intègre et transparente.
Il n'y a pas que la mémoire, et pourtant la mémoire seule suffirait. La mémoire des victimes de Karachi, déchiquetées dans leur bus par la folie de l'islamisme ou des règlements de comptes de barbouzes. Au nom des morts, il faut que la justice avance et, perçant la fumée toujours opaque de l'attentat de 2002, fasse la lumière sur le mobile des assassins: punissaient-ils la France pour son combat contre l'intégrisme ou pour son zèle corrupteur? La nation a-t-elle payé pour sa noblesse ou pour sa pourriture? 
Il n'y a pas que la vérité, et pourtant la vérité seule suffirait. La vérité sur les mouvements de fonds qui ont accompagné le contrat Agosta, vente de sous-marins en eaux troubles, dont l'étrave a brassé des vagues d'argent avant même d'être carénée. Les citoyens ont le droit de savoir combien l'on a versé aux décideurs pakistanais et aux intermédiaires de tout poil, dans cette légalité immorale où baigne la conscience des marchands d'armes. Nous avons surtout le droit de savoir quelles sommes sont revenues vers la France, pour remplir quelles poches, sous le vocable propret de "rétrocommissions". Car le néologisme tombe le masque: une commission, c'est de la corruption rebaptisée par la raison d'Etat; une rétrocommission, c'est du vol. Et c'est même un meurtre par procuration si les employés de la DCN ont été tués pour un robinet d'argent sale trop vite fermé. 
Il n'y a pas que l'éthique, et pourtant l'éthique seule suffirait. Elle suffirait à justifier qu'on dotât le juge Van Ruymbeke de pouvoirs exceptionnels dans son investigation. Si des ministres, des élus, des conseillers ou des fonctionnaires ont reçu des valises de billets, il faut tout faire pour que leur identité soit établie, leur argent, saisi, et leur procès, exemplaire. Mais c'est parce que cette enquête n'a presque aucune chance de percer les bons coffres, ni d'arrêter les vrais coupables, qu'il faut soutenir sans relâche le magistrat. Afin que la France récupère son honneur en aidant la justice, à défaut de l'avoir préservé en empêchant la corruption. Le Conseil constitutionnel cèle le décryptage des comptes de campagne de la présidentielle de 1995? Que les scellés sautent par une volonté supérieure à celle des Sages: la volonté du peuple. Le magistrat ne peut interroger l'actuel président, qui suivit de près le contrat Agosta? Que Nicolas Sarkozy s'exprime de son plein gré, au nom de cette probité dont il se veut un parangon - et pourquoi ne pas lui en faire crédit? 
Edouard Balladur imposa il y a plus de quinze ans un financement de la vie politique des plus drastiques, avec des recettes limitées et publiques, et des dépenses plafonnées et contrôlées. Si l'ancien candidat à l'Elysée ne veut pas que tombe en cendres, chimère d'intégrité, ce moment politique, il doit demander à tous ceux qui l'ont soutenu dans sa campagne présidentielle de se tenir à la disposition du juge. 
L'argent qui n'a pas d'odeur a souvent senti la poudre dans notre pays vendeur d'armes. Cette fois, il a un parfum de sang. L'affaire Karachi ne saurait être étouffée. 

"Les journalistes ont trahi la confiance du président"

Franck Louvrier, le conseiller en communication de Nicolas Sarkozy, était l'invité d'un débat sur la communication politique. Il a réagi à la "controverse de Lisbonne"
La communication a-t-elle tué la politique? Pas plus, pas moins. La question était au centre d'un débat organisé mardi soir dans le cadredes Mardis de l'Essec.  
Une question d'actualité depuis la récente polémique née des propos tenus "off" par Nicolas Sarkozy, en marge du Sommet de Lisbonne, à un groupe de journalistes - taxés ironiquement de "pédophiles". Au cours de cet échange, le président de la République avait usé de cette comparaison, qu'on peut juger maladroite, pour souligner que les soupçons à son égard ne reposent sur aucun fait concret. 
L'un des deux invités du débat était particulièrement à même de rebondir sur cet événement: Franck Louvrier est le conseiller en communication du chef de l'Etat. Le PDG du groupe de communication Euro RCSG, Laurent Habib portait la contradiction. 
Franck Louvrier ne s'est pas défilé. Il est revenu, de manière concise mais remarquée, sur l'épisode de Lisbonne - et le rapport entre la communication politique et sa manière dont les médias la retranscrivent, voire l'interprêtent.  
La fin du off?
Ce fidèle parmi les fidèles de Nicolas Sarkozy a un avis tranché sur le sujet: la déontologie des journalistes "explose". 
Selon lui, quand Nicolas Sarkozy s'exprime sur l'affaire Karachi et rejette toute responsabilité en la matière en qualifiant avec ironie les journalistes de "pédophiles", il tient une conversation privée - comprendre: qui n'aurait jamais dû être rendue publique. 
"Ces fuites sont regrettables, car elle trahissent la confiance accordée aux médias par le président, explique-t-il. Relayées par d'autres médias, les paroles du président ont été transformées, exagérées dans leur tonalité et ressorties de leur contexte." Pour y remédier, Franck Louvrier a une solution toute trouvée, "un réel contre-pouvoir aux médias." 
A l'opposé, Laurent Habib préfère s'intéresser à la responsabilité du monde de la communication. Les communicants ont un rôle à jouer dans le rapport avec les journalistes. "Peut-être devons-nous réfléchir à une autre manière de communiquer?" s'interroge-t-il. Un changement qui pourrait passer, notamment, par une refonte du système des interviews. 

Pour Audrey Pulvar



Deux vainqueurs, un de trop ?

François Fillon et Jean-François Copé sont donc les deux nouveaux hommes forts de la droite. Vont-ils s’entendre ou s’opposer ?

A l’Assemblée hier, l’élection de Christian Jacob a la tête du groupe UMP fut une victoire de Jean-François Copé. A l’Assemblée aujourd’hui, le discours de politique générale sera le triomphe de François Fillon. Deux moments forts qui confirment les deux grands vainqueurs de la longue séquence du remaniement. Deux grands vainqueurs car l’un comme l’autre se sont véritablement imposés à Nicolas Sarkozy. Le chef de l’Etat n’a pas pu changer de premier ministre comme il l’avait imaginé et il n’a pas pu faire autrement que de confier l’UMP, son parti, à un cadet aussi ambitieux que lui.

Fillon et Copé sont donc à la fois plus puissants et plus libres qu’avant. On se souvient que le Premier ministre avait du endurer un statut de « collaborateur », conséquence de l’hyper présidence Sarkozy, et que le maire de Meaux avait vécu comme une relégation d’être chassé du gouvernement en 2007. Et bien les deux hommes ont su transformer une situation inconfortable en bastion inexpugnable. Ce n’était pas écrit d’avance, c’est le signe d’un vrai talent politique.

François Fillon a maintenant les moyens d’agir. Son premier discours de politique générale, juste après sa nomination, avait été torpillé par une interview du secrétaire général du gouvernement, Claude Guéant, qui avait tout dit par avance. Cette fois, rien de tel : personne n’est venu parasiter la prise de parole du premier ministre. Quand à Jean-François Copé, il a réussi le doublé. Il a le parti et, grâce à son ami Jacob, il a aussi le groupe. Un des ses collaborateurs nous racontait que son offre de service sur l’UMP formulée fin juillet avait été un coup de bluff complet. Parfois, le bluff, ça marche.

François Fillon et Jean-François Copé sont donc les deux nouveaux hommes forts de la droite. Vont-ils s’entendre ou s’opposer ? Les lois de la politique sont quasi immuables : deux vainqueurs, c’est un de trop. Et ce n’est pas un hasard si Copé avait soutenu la candidature de Borloo à Matignon et que Fillon a tout fait pour que Copé entre au gouvernement afin de l’avoir sous ses ordres plutôt qu’en face de lui. Fillon-Copé, le match est quasiment écrit d’avance. Même s’ils n’ont pas tout à fait le même âge, 55 ans pour le chef du gouvernement, 45 ans pour le chef du parti, les deux hommes jouent la pôle position pour l’après Sarkozy. En 2017, ou pourquoi en 2012 au cas où. Et même si tous les deux affirment de bonne fois vouloir aider Nicolas Sarkozy a être réélu, se posera tôt ou tard la question : qui est le patron de la campagne : le chef du parti ou le chef du gouvernement.

Souvenez-vous : on avait eu le même cas de figure entre Laurent Fabius et Lionel Jospin sous Mitterrand. Ça avait donné le congrès de Rennes. Cette fois, le Premier ministre va montrer, dès cette après-midi, qu’il est l’homme qui conduit les réformes. Le secrétaire général de l’UMP voudra prouver qu’il est l’homme qui apporte des idées. Copé est puissant à l’UMP et à l’Assemblée ; Fillon se montrera attentif à toutes les sensibilités de la majorité et cajolera le Sénat. C’est d’ailleurs la première fois sous la Ve République, qu’un Premier ministre refera son discours de politique général au Sénat avec un vote de confiance, au lendemain de celui de l’Assemblée.

Entre les deux hommes, au mieux, ce sera une saine émulation. Au pire, attachez vos ceintures.

2011 : le retour de la stagflation ?

Comme vous le diront les grands économistes, « l’inflation, c’est comme le ketchup » : comme ça ne sort pas naturellement, on tape dessus, encore et encore, jusqu’à ce qu’on en ait plein son assiette…

Salaires en hausse de 20 % en Chine, prix des matières premières de retour au pic du premier semestre 2008, biens alimentaires attendus en hausse à deux chiffres par la FAO, prix de l’habillement au Royaume-Uni estimé par Next en hausse de 8 %... autant de signes annonciateurs du retour de l’inflation dès 2011. Le concept de “core inflation”, officiellement sous contrôle, devient ainsi de moins en moins pertinent pour le commun des mortels des lors qu’il exclut la hausse des principaux postes de dépenses… Allez donc expliquer l’absence d’inflation aux Parisiens, quand seulement 1 %, s’ils n’ont pas eu la chance d’hériter un capital de leurs parents, peuvent financièrement se loger dans plus de 100m2…

On voit bien, comme lors du premier semestre 2008, la réaccélération du transfert de richesses des pays développés, dont la valeur ajoutée est de moins en moins reconnue par le client final, vers les pays émergents, riches de leurs ressources naturelles.

A ce retour de l’inflation semblent s’allier les premiers signes de ralentissement de la reprise économique non seulement de la part du consommateur (révisions de Carrefour ou Ahold dans la distribution alimentaire), mais, de manière plus surprenante, également de la part du secteur de la technologie et de l’informatique, illustré par les récentes alertes de Cisco, Autonomy ou CapGemini. Sans doute faut-il y voir les premiers effets des coupes budgétaires de l’Etat – qui, on l’oublie trop souvent, représente encore 20 à 25 % du secteur IT (informatique et télécommunications, ndlr) pourtant perçu généralement comme relevant seulement du secteur privé.

Ajoutons enfin une dose de “risque souverain”, terme politiquement correct pour décrire la perte de souveraineté avérée cette semaine dans le cas de l’Irlande, avant celle à venir du Portugal, devançant sans doute d’une courte tête l’Espagne, dont on attend toujours les reformes structurelles promises en juin dernier ; une Espagne bien en retard par rapport aux efforts impressionnants déployés par l’Irlande tout au long de 2010, malheureusement perdus d’avance face à l’endettement global record du pays de près de 300 % du PNB.

Ce cocktail de retour d’inflation allié au ralentissement économique rappelle dangereusement la stagflation de la deuxième moitié des années 1970, ou plus récemment, de la première moitié 2008 dont on se souvient comment les espoirs théoriques de “decoupling” vinrent finalement se heurter à la réalité d’un monde désormais pleinement globalisé. Et gardons de plus en tête que la crise irlandaise marque bien plus le début plutôt que la fin des crises étatiques, là encore confirmées par l’annonce grecque cette semaine de révision à la hausse de leurs déficits publics…

« Gouverner, c’est prévoir » disait Emile de Girardin. « Gouverner, c’est : faut voir ! » semblent lui répondre nos dirigeants européens, désespérément réactifs face aux attaques des marchés financiers, dont, sans jouer les Nostradamus, on peut légitimement s’attendre à ce qu’elles s’accélèrent tout au long de 2011.

Alors, au moment où tous les experts semblent s’accorder sur les mérites des actions européennes, à l’heure où, à en croire le sondage de Bank of America-Merrill Lynch du mois de novembre, les gérants actions européennes n’ont jamais été autant investis depuis l’été 2007, l’heure n’appellerait-elle pas plutôt de manière contrariante à la prudence pour 2011 ?

Un peu comme les dirigeants d’Adidas ou de Saint Gobain qui, refusant de commenter les perspectives de 2011, viennent de préférer se fixer publiquement des objectifs stratégiques à l’horizon cinq ans plutôt que les trois ans standards… Un peu comme si 2013 pouvait être encore retardée de deux ans ?

La France cédera-t-elle aux menaces d’al-Qaida ?


Jeudi dernier, al-Qaida au Maghreb islamique (Aqmi) a sommé la France de « retirer ses soldats d’Afghanistan », puis de traiter avec Ben Laden pour obtenir la libération des otages français.


En lançant ses menaces à la veille du sommet de l’Otan à Lisbonne et en précisant que « toutes les négociations devront être conduites avec Oussama Ben Laden et selon ses conditions », Aqmi a réussi un coup médiatique. Ce changement de « com », qui consiste à lier le sort des cinq otages français enlevés le 16 septembre au Niger à la présence de troupes françaises en Afghanistan, vise à renforcer le sentiment de peur dans l’opinion. Car c’est la première fois en sept ans qu’Aqmi (ex-GSPC algérien, ayant fui l’armée algérienne et replié dans le désert) joue autant la carte Ben Laden, avec qui les liens sont en réalité presque inexistants. Mais en déclarant n’être qu’« une partie d’un grand mouvement planétaire dirigé par Oussama Ben Laden », lequel donnerait les ordres, Aqmi laisse entendre qu’elle est plus puissante qu’on ne le croit, et fait ainsi monter les enchères.


Elle tente aussi de semer le doute dans les services de sécurité pour pousser Paris à payer. De son côté, Ben Laden, affaibli dans son repère afghan face aux offensives américaines et qui a récemment averti la France qu’elle « ne serait jamais en sécurité tant qu’elle resterait en Afghanistan », a intérêt à faire croire qu’il contrôle Aqmi. C’est que l’enjeu financier est énorme pour les terroristes qui ont tissé partout des liens avec les trafiquants et les clans criminels. Rien qu’au Sahel, les preneurs d’otages ont, depuis 2007, reçu des rançons de plusieurs millions de dollars.


Le fait que des Etats aient déjà payé a augmenté leur appétit


Par ailleurs, si les terroristes tuent des innocents, c’est pour attirer l’attention des médias, leur meilleur allié, grand amplificateur des peurs. Or la peur est la pire faiblesse des démocraties. D’où la pertinence des propos de Nicolas Sarkozy qui assure que « nous ne changerons pas d’un iota notre politique sous prétexte que nous sommes menacés », et qui recommande de ne pas se rendre en zone contrôlée par les ravisseurs. En fait, le dilemme est terrible pour les démocraties : doivent-elles abandonner leurs ressortissants kidnappés en zone non recommandée en ne cédant pas au chantage afin de décourager les terroristes, ou doivent-elles payer les ravisseurs au risque de créer des précédents ?


Ce qui se passe aujourd’hui du désert du Mali aux côtes somaliennes rappelle en fait les pirateries barbaresques qui terrifièrent l’Europe jusqu’à la colonisation (1830). Djihadistes de l’époque, les barbaresques avaient pour base le Maghreb et réclamaient des rançons en échange des otages chrétiens capturés en Méditerranée. Cette industrie du djihad, parrainée par le califat ottoman d’alors, enrichissait la Casbah d’Alger et le Maghreb. Comme l’explique l’islamologue anglo-égyptienne Bat Ye’or dans son livre L’Europe et le spectre du califat (Les Provinciales), aujourd’hui, la différence réside dans le fait que les démocraties européennes, contrairement aux Etats-Unis, sont tentées par la compromission et préfèrent céder à la peur (« dhimmitude ») plutôt que d’accepter la perte des vies humaines ou l’idée d’une guerre entre djihadistes et sociétés ouvertes. Il faut certes être solidaires des otages, mais il convient aussi de responsabiliser ceux qui séjournent en zone « déconseillée », puis les Etats « amis » qui laissent les terroristes agir, du Niger au Pakistan…

Le mécanicien de la machine à perdre


Qu’est-ce que l’affaire de Karachi que certains espèrent bien transformer en un « Karachigate » pour empêcher la réélection de Nicolas Sarkozy ?
C’est d’abord une tragédie humaine avec la mort de onze techniciens français victimes d’un attentat inexpliqué à Karachi, au Pakistan, en 2002.
C’est ensuite une interrogation sur le financement des campagnes présidentielles par l’argent noir des rétro-commissions sur les ventes d’armes à l’étranger.


Avec des soupçons, sans le moindre commencement de preuve, sur le financement de la campagne d’Edouard Balladur en 1995. Rien ne le prouve, à commencer par la validation des comptes de cette campagne par un Conseil constitutionnel présidé à l’époque par Roland Dumas, l’ami intime de François Mitterrand, un Conseil dans lequel se trouvaient d’éminents socialistes.


Rien ne prouve non plus à ce jour qu’il y ait un lien de cause à effet entre l’arrêt de versement des commissions décidé par Jacques Chirac et l’attentat de Karachi.


Mais alors pourquoi ce tintamarre politico-médiatique qui met Karachi à la une depuis plusieurs jours ?


Tout simplement parce qu’un ancien Premier ministre, Dominique de Villepin, déjà impliqué dans la ténébreuse affaire Clearstream pour laquelle il sera bientôt rejugé en appel, a décidé que tous les moyens étaient bons pour abattre politiquement Nicolas Sarkozy. L’ingénieur mécanicien de la campagne d’insinuations vole de radios en plateaux de télévision pour dénigrer sans jamais le nommer un président de la République qui fut, c’est la seule chose avérée, ministre et porte-parole de M. Balladur il y a quinze ans.


Alors même que le président socialiste de la mission d’enquête parlementaire, Bernard Cazeneuve, peu suspect de sarkozysme, reconnaît que, jusqu’à présent, il n’a pas rencontré M. Sarkozy sur son chemin dans son enquête. Le but de M. de Villepin est de relancer la guerre au sein de la droite entre balladuriens et chiraquiens au moment même où M. Sarkozy, en confirmant François Fillon et en faisant coexister au gouvernement les uns et les autres, s’efforçait de les rassembler. Comme en 1981 avec l’affaire des diamants menée par le RPR et le PS contre Giscard, la machine à perdre est en route.

Les grèves ont coûté 150 millions d’euros à la SNCF

Les grèves d’octobre sur la réforme des retraites ont coûté 150 millions d’euros à la SNCF, a indiqué mardi son président, Guillaume Pepy, devant des députés.

Manque à gagner et coûts supplémentaires ont affecté le groupe public à hauteur de 200 millions d’euros, a précisé Pepy devant la commission du développement durable de l’Assemblée nationale, mais cette somme est ramenée à 150 millions si l’on retranche ce que la SNCF n’a « pas dépensé » (droits de circulation des trains, retenues sur salaires…). La SNCF avait indiqué fin octobre que les effets de la grève pèseraient sur ses comptes du quatrième trimestre.
Lors de la présentation des résultats du premier semestre – qui s’était terminé sur un modeste résultat net de 80 millions d’euros –, son directeur financier, David Azéma, envisageait fin août « plutôt la probabilité d’être dans le vert » pour l’ensemble de l’exercice, mais tenait à se montrer « prudent », des « aléas » étant susceptibles de peser sur les comptes.
Les comptes de la SNCF, qui étaient dans le vert depuis sept ans, ont viré au rouge en 2009 avec une perte de près de 1 milliard d’euros, attribuable à la crise mais aussi à des faiblesses structurelles, notamment dans le fret.

SALAUDS DE COMMUNISTES QUI NOUS OBLIGENT A PAYER LA FACTURE, ALORS QU'EUX TOUCHERONT 32 EUROS D'INDEMNITÉ JOURNALIÈRE VERSÉE PAR LA CGT.

"Le gouvernement est autiste, ça m'a donné envie de crier plus fort"

"Il y a toujours matière à faire bouger les choses, tant qu'il y aura un mouvement, on y participera", lance Florence Benoist. L'employée à la mairie d'Ivry, venue manifester avec ses collègues, est déterminée. A Paris, pour le onzième rassemblement contre les retraites depuis fin mai, les syndicats avaient anticipé la faible mobilisation (9 000 à 10 000 selon les syndicats, 3 200 selon la police) et organisé le parcours en conséquence : très bref, le temps d'un petit tour entre la place de l'Opéra et la Bourse.


Sa collègue de la mairie, Livia Pouponnot, explique : "Après un gros effort, le mouvement retombe, les gens sont fatigués". A son onzième jour de grève, Florence Benoist estime perdre environ deux semaines et demi de salaire. Avec 1 300 euros mensuels, son fils est prévenu :"il n'y aura pas des milliards de cadeaux à Noël". Si elle continue de quitter le bureau pour manifester, c'est "pour moi et mon fils," explique-t-elle.
Devant l'essouflement progressif de la mobilisation, le groupe venu d'Ivry imagine d'autres moyens d'action. "On pourrait aller bloquer les autoroutes, Rungis, les TGV...", avance évasivement Florence Benoist.

"LES DIVISIONS, C'EST TOUJOURS NÉFASTE"
Coût financier des journées de grèves, fatigue, froid, les manifestants parlent aussi de la frustration des collègues qui ont préféré rester au travail devant "un gouvernement sourd". D'autres admettent à demi-mot que les divisions syndicales ont aussi participé à l'érosion du mouvement. "La CFDT ne veut plus de manif, FO veut la grève générale : les divisions, c'est toujours néfaste," explique Gérard Germain, retraité depuis deux mois.
Etudiants, retraités, employés de la fonction publique et libéraux, tous espèrent toujours l'abrogation de la loi. Mais le mot "retraites" n'est plus le seul à hanter les cortèges : le chômage, les salaires, l'emploi des jeunes, les conditions de travail reviennent régulièrement dans les discussions entre manifestants. "Tout est lié", explique Livia Pouponnot, avant de lancer, agacée : "On peut arriver à faire des économies sur autre chose que sur les plus petits".
"IL Y A D'AUTRES LOIS EN PRÉPARATION"
Derrière une marionnette symbolisant une justice blessée au visage, les baguettes du Cirque du Soleil claquent sur les tambours, rythmant les quelques slogans. Marie-Christine, une kinésithérapeute libérale, est venue manifester pendant ses vacances. Elle sent la résignation et la lassitude croissantes des patients avec qui elle échange. Elle dit ne pas être découragée par l'essoufflement du mouvement : "Je suis renforcée dans mes convictions : comme le gouvernement est autiste, ça m'a donné envie de crier plus fort". Si elle participe au rassemblement, c'est parce qu'elle veut faire pression sur le gouvernement : "Il y a d'autres lois en préparation et je pense que ça va pousser le gouvernement à être plus prudent, à prendre plus d'avis en considération". Beaucoup de manifestants évoquent le prochain débat sur la santé et considèrent cette mobilisation comme un moyen de peser dans les prochaines réformes.
Un peu plus loin, un groupe d'enseignantes sous la banderole de FSU "pas résignées mais clairvoyantes" disent attendre la décision de l'intersyndicale, le lundi 29 novembre, avant se mobiliser une nouvelle fois contre les retraites. Elles estiment que le mouvement a changé les relations au travail où les conversations sont plus politisées. "On parle plus ouvertement, ou plutôt on re-parle après 1995", explique Gisèle Skriabin, enseignante dans le primaire. Le groupe de collègues pense aussi que les dossiers par branche professionnelle vont prendre le relais de la mobilisation sur les retraites et savent quand elle iront de nouveau manifester : le 22 janvier 2011, pour protester contre le budget alloué à l'éducation nationale.

CE PAUVRE CRÉTIN EST PÉNÉTRÉ DE SA "MISSION", C'EST PATHÉTIQUE. 
LA FRANCE EST DANS UNE MERDE  NOIRE, À CAUSE DES LARGESSES SOCIALISTES, ET CE SOMBRE ABRUTI VEUT ENCORE PLUS DE SOCIALE : 
QUEL CON !!!

LE COMMENTAIRE DE CHRISTOPHE BARBIER


Le choix des mots

Cette fois, il n’y a pas de querelle de chiffres, du moins au niveau national : la neuvième journée d’action contre la réforme des retraites, depuis septembre, n’a pas mobilisé les foules. François Chérèque, le patron de la CFDT, n’a même pas pris la peine de manifester.

Pourquoi avoir maintenu cette journée dont tout le monde sentait bien qu’elle était de trop, quinze jours après la promulgation de la loi ? Mystère. La CGT, qui a voulu à tout prix sortir une fois de plus les banderoles, a cédé aux jusqu’au-boutistes, sans s’apercevoir qu’elle faisait un beau cadeau à François Fillon : le Premier ministre prononce aujourd’hui son discours de politique générale. L’évaporation accélérée des manifestants à la veille de ce rendez-vous lui permet de tourner tranquillement la page de l’agitation automnale.

La voie du gouvernement n’est pas dégagée pour autant. À peine sorti des turbulences sociales, il est pris dans le tumulte de l’affaire Karachi, après les révélations de Charles Millon, ancien ministre de la Défense, et Michel Mazens, ex-PDG d’une société de commercialisation de matériels militaires, sur l’existence de pots-de-vin, et de probables « rétro-pots-de-vin », lors de la vente de sous-marins Agosta au Pakistan, en 1994. La fin du quinquennat de Jacques Chirac avait été polluée par l’affaire Clearstream. La dernière partie du mandat de Nicolas Sarkozy pourrait être brouillée par cette affaire Karachi, bien plus grave, parce qu’entachée de la mort de onze salariés français.

Et une autre tempête souffle sur l’Europe : celle des déficits grec, irlandais, portugais… et français. Finalement reconduit à Matignon, François Fillon a, paraît-il, obtenu plus d’autonomie de la part du chef de l’État, et il voudra le prouver à l’Assemblée, aujourd’hui. Mais sur le plan financier et budgétaire, cette autonomie ne lui servira à rien, puisque Paris a perdu toute marge de manœuvre vis-à-vis de Bruxelles et de Washington, où veille le FMI. S’ils ne veulent pas se retrouver dans l’humiliante position de la Grèce et de l’Irlande, Nicolas Sarkozy et François Fillon ne peuvent que continuer à serrer la ceinture des Français. Il ne leur reste que le choix des mots pour faire passer la pilule : au lieu de parler ouvertement d’austérité, le Premier ministre garde le loisir de vanter la poursuite des « réformes ». Le résultat sera le même.

Le jeu du 38e parrallèle

Ce n'est pas la première fois, hélas, que la paranoïa enchaîne l'Histoire, et la traîne derrière elle. Le bombardement d'hier pourrait apparaître comme un simple avatar supplémentaire sur la longue liste des « incidents » entre les deux Corées. Le comique le dispute souvent au tragique, en effet, dans l'affrontement entre les deux frères ennemis, toujours officiellement en guerre depuis... cinquante-sept ans sans qu'on puisse jamais distinguer le gravissime de l'anecdotique. On ne compte plus les épisodes d'une extravagante surenchère militaire entre les deux camps qu'un conflit hérité d'un autre siècle continue d'opposer de part et d'autre de ce 38e parallèle où plus d'1,5 million d'hommes se font face, officiellement prêts à en découdre.
Mais cette fois, on ne rit plus. La provocation de Pyongyang a été meurtrière, elle a touché des civils, et elle intervient à un moment où la tension entre les deux rivaux électrise le rapport de forces déjà crispé entre leurs deux grands alliés respectifs, les États-Unis et la Chine. L'apparente folie nord-coréenne a rarement des accès gratuits. En l'occurrence, elle correspond, paradoxalement, à une phase d'ouverture (relative) de la diplomatie du régime vers Washington. Une façon d'exister aux yeux du monde qui emprunte nécessairement à la violence rituelle contre le voisin du sud tout à la fois honni et désiré.
Voilà vingt ans que les Nord-Coréens ont parfaitement compris qu'ils pourraient faire les frais de la fin du monde bipolaire. Même Pékin, qui a toujours soutenu ses encombrants protégés, a été souvent tenté de prendre ses distances avec eux. Quelques obus et voilà Hu Jin Tao contraint de ne pas les considérer comme quantité négligeable.
Si Pyongyang ne marchandait pas la paix avec sa technologie nucléaire, le dossier serait réglé depuis longtemps. Mais il faut bien, une fois de plus, composer avec le caractère imprévisible de son régime fragilisé par la fin de règne du « Cher leader », Kim Jong Il. Rien n'est plus dangereux, chacun le sait, qu'une dictature à bout de souffle dont l'armée contrôlera jusqu'au bout la respiration. Elle veut aujourd'hui montrer que le successeur désigné, le jeune Kim Jong-Un, sera bien dans la lignée brutale de son père et de son grand-père, Kim-Il-Sung.
De leur côté, les diplomaties occidentales font semblant de s'inquiéter, c'est le jeu, mais elles sont seulement préoccupées. Personne, en effet, n'a intérêt à ce que la situation dégénère. Sans même parler du risque nucléaire, un conflit aurait des conséquences catastrophiques pour la croissance de toute la région. Aujourd'hui, même le Sud prêche l'apaisement! Quant à l'Amérique et ses 28 000 hommes, elle a perdu toute envie de nouvelle croisade contre l'axe du mal. Elle a déjà donné...


La recherche d'un projet politique

depuis une semaine, depuis l'intervention télévisée de Nicolas Sarkozy consécutive au remaniement du gouvernement, les Français en savent plus sur « les » projets de l'exécutif pour la dernière phase du quinquennat : pour l'essentiel, l'année 2011 sera consacrée à mettre en place une couverture sociale pour les personnes âgées dépendantes et à réformer la fiscalité sur le patrimoine. Aujourd'hui, les Français devraient en savoir plus sur « le » projet politique de l'exécutif pour cette dernière partie du quinquennat.

Par un renversement des rôles institutionnels, c'est en effet au Premier ministre, François Fillon, qu'il revient, cet après-midi, dans sa déclaration de politique générale, de mettre en perspective les annonces du chef de l'Etat. De théoriser la pratique. De donner un sens à l'action. A lui de caractériser l'avenir, lui dont la première déclaration générale, au début de juillet 2007, épousait la voie présidentielle de la libération de la croissance par le travail et de la révolution de la politique par l'ouverture.

Se succédant à lui-même, le Premier ministre se dira logiquement déterminé à maintenir intact l'élan de la réforme. Mais cela suffit-il à définir un cap, à dessiner une doctrine politique au moment où, malgré les soubresauts qui secouent la zone euro, la France entrevoit la sortie de crise ? Cela peut-il tenir lieu de vision de la société au moment où, bien que ses promesses ne soient pas finançables, le Parti socialiste place l' « égalité réelle » au coeur de sonprojet ?

Pour la droite, le défi n'est pas seulement de gagner la bataille de l'action, autrement dit celle du bilan, il est aussi de se mettre en position de remporter celle des idées. Or, sur ce terrain-là, ce n'est plus de l'Elysée, maison désertée par les conseillers de la première heure - hier encore avec le départ du conseiller social Raymond Soubie -, que vient l'énergie créatrice. C'est de l'UMP qui, avec Jean-François Copé comme secrétaire général, a vocation à redevenir le laboratoire de la droite. Est-ce aussi de Matignon, dont l'hôte fut l'un des artisans du projet de 2007 ?

Après la parenthèse du retour de l'Etat protecteur, l'opportunité s'offre à lui de replacer l'action sous le signe de la nécessaire compétitivité de l'économie française. Pour François Fillon, l'enjeu est aussi de se distinguer, ou non, d'autres « deuxièmes » Premiers ministres de la Cinquième, qui ont été des hommes de combats - l'inflation pour Raymond Barre en 1976, l'emploi pour Dominique de Villepin en 2005 -, pas de projets.

Fausse route


dans un monde de tricheurs, cela peut-il avoir un sens d'être le seul à respecter les règles ? Face à une Chine manipulant sa monnaie et échangeant contrats contre transfert de technologies ou face à des Etats-Unis n'hésitant pas à casser des appels d'offres publics lorsqu'ils ont été perdus par les firmes américaines, la France ne devrait pas faire preuve de naïveté. Il faut défendre le « made in France », taxer les importations, jouer la carte de la préférence nationale, lutter par la loi contre les délocalisations…


La rhétorique est séduisante mais la réalité économique est autre. Que l'armée française ayant besoin de camions préfère ne pas finaliser une commande remportée à la loyale par Fiat pour ménager Renault Trucks n'a guère de sens. D'abord parce que dans le cas présent, l'italien Fiat-Iveco s'est associé avec un partenaire français. Ensuite parce que Renault Trucks, bien qu'il produise en France, est désormais contrôlé par le suédois Volvo. Mais, enfin et surtout, car ce que les salariés des usines de Renault Trucks vont gagner sera sans doute demain payé par le contribuable français au travers de surcoûts. En effet, qui dit protectionnisme dit en général hausse des prix pour le consommateur.


L'affaire Iveco est d'autant plus maladroite que la défense est un monde à part. Au nom de l'intérêt supérieur de la nation, les Etats peuvent légalement s'affranchir des habituelles règles du jeu commercial. Pour préserver une industrie domestique stratégique, il est admis que le protectionnisme soit parfois de rigueur. Mais est-ce le cas pour des camions ?


Surtout, à l'heure où la contrainte budgétaire pèse sur les Etats, le signal adressé par la France est contre-productif. Plutôt que le chacun pour soi, la priorité européenne devrait, au contraire, être de dépasser le stade des champions nationaux pour favoriser via des coopérations poussées ou des fusions assumées la naissance de champions à l'échelle du continent. Dans les secteurs les plus stratégiques comme dans ceux qui le sont moins. Dans les porteavions comme dans les camions. Même si elle est difficile, seule cette route permettra d'innover, de rivaliser face aux Américains, Russes ou Chinois et ainsi d'exporter… Mais pour vendre aux autres, il faudra aussi accepter d'ouvrir nos marchés.

Penser à tout âge et en tous lieux

Vous ne serez jamais plus intelligent qu'à présent ! » Pédagogue légendaire, le philosophe Alain (1868-1951) avait coutume, en s'adressant à ses élèves, de rappeler cette vérité. Chacun, demain, sera peut-être plus instruit ou plus habile, mais sa faculté de penser restera la même. Résultat : inutile d'attendre, pour réfléchir, c'est toujours maintenant ! La philosophie n'a pas à être soumise à des conditions d'âge, pas plus que de température ou de pression. Rappel utile quand on vient d'apprendre que des initiations à la réflexion philosophique se mettront en place, dès la rentrée prochaine, dans des classes de seconde et de première.

Proposée de longue date, cette excellente mesure suscite çà et là critiques et soupçons. Au-delà des manigances idéologiques, il faut rappeler combien le mythe de l'âge adéquat et de la maturité supposée indispensable sont des baudruches cycliques. Les philosophes doivent, depuis l'Antiquité, continûment les dégonfler. « Que nul, étant jeune, ne tarde à philosopher, ni, vieux, ne se lasse de la philosophie », Epicure commence ainsi la célèbre « Lettre à Ménécée ». Socrate dans le « Ménon » interroge un jeune esclave. L'enfant est inculte, évidemment, mais il parle et pense, donc peut discerner le vrai et le faux : il saura comprendre, dans un problème de géométrie, et l'erreur qu'il a commise et la bonne solution.

Réserver la pensée à un âge particulier, mais pourquoi donc ? Quand il s'agit de s'exercer à la musique, au sport, aux affaires, est-il jamais trop tôt ? Jamais absolument trop tard ? Il est toujours temps, dans la vie d'un être humain, de s'étonner, de poser des questions, de ne pas se contenter des réponses, d'interroger encore… Sous des formes diverses, la philosophie a partout sa place - du jardin d'enfants jusqu'à la maison de retraite. Il n'existe pas de barrière qui tienne entre les idées et les générations. Pas plus qu'entre les continents.

Car l'espace de la pensée, lui aussi, s'est définitivement ouvert. On enseigne à présent Platon en ourdou, Descartes à Lima, Hegel en coréen à Séoul. Ces grandes oeuvres sont lues et commentées là même où n'existait aucun enseignement philosophique, il y a seulement deux ou trois générations. Sur tous les continents, de nombreux pays, échappant à une dictature militaire ou à la chape de plomb marxiste, ont trouvé dans la philosophie un espace de débats pluraliste. La mondialisation entraîne aussi la confrontation croissante des philosophies occidentales et des philosophies d'ailleurs. Si le mot « philosophie » est grec, la chose n'est pas exclusivement européenne. L'Inde est porteuse d'un vaste héritage proprement philosophique, la Chine aussi, le Tibet également, ainsi que les mondes arabe, persan, hébreu. Un immense travail de comparaison s'est entamé. Ce qui en sortira ? Sûrement pas une mixture fusionnelle - plutôt la découverte d'écarts féconds.

Fini, donc, le rêve déjà ancien et si singulier de cette belle classe de philosophie à la française, créée en 1844, qui voulait couronner d'un paradis d'idées le cycle des études. Après avoir acquis des connaissances, le jeune esprit accédait à leur compréhension unifiée : la diversité des savoirs se mettait en ordre et devenait intelligible. Ce n'est plus le cas. Il faut rénover cet enseignement pour mieux le préserver. Et l'ouvrir à une philosophie devenue multiple, dont les frontières d'âges comme de cultures sont en voie d'effacement.

En fin de compte, il n'y a pas à choisir entre la philosophie pour experts et celle pour enfants, entre l'Occident et l'Orient, la terminale et la seconde, les séminaires de recherche et le café du commerce. Il faut aimer, au contraire, cette diversité impure. Partout ailleurs, une fois encore, personne ne s'en étonne. Les affaires, c'est au souk comme à la City. La musique, Schönberg ou le rap. Le sport, au club Mickey et aux jeux Olympiques. Inutile d'assigner la pensée à résidence, de la proclamer légitime ici et impossible ailleurs, de vouloir la cantonner à un âge, une culture ou une langue. Il faut imaginer Sisyphe polymorphe.

Quand la crise irlandaise sert l'euro


Après la crise grecque, voici le tour de l'Irlande. Et l'on égrène avec un sadisme légèrement teinté de masochisme la liste des suivants potentiels. Le sujet est grave et n'émet quasiment que des ondes négatives. On souligne notamment le risque que cette nouvelle crise, à moins que ce ne soit la prochaine, fasse éclater l'euro. Mais comme, en économie, rien n'est jamais simple, on peut soutenir aussi que la crise irlandaise sert l'euro !


La politique monétaire américaine devrait en effet susciter une nouvelle flambée de l'euro par rapport au dollar. Si l'on additionne le jeu du différentiel des taux pratiqués par les deux banques centrales et la crainte inflationniste générée par les 600 milliards de dollars de pure création monétaire injectés par la Fed, l'euro devrait logiquement s'envoler vers ses sommets d'antan. Or il n'en est rien, pour le moment. C'est d'autant plus frappant que les monnaies de nombreux autres poids lourds de l'économie mondiale, à commencer par le Brésil, subissent une forte pression à la hausse. Le niveau du prix de l'or, autour de 1.400 dollars l'once, montre également que les capitaux sont à la recherche de refuges plus sûrs que le dollar. Pourquoi donc l'euro reste-t-il sagement autour de 1,35 dollar, épargnant ainsi une nouvelle crise de compétitivité ? Cette fois-ci, la réponse est simple. Les graves difficultés vécues par les maillons les plus faibles de la zone euro dégradent la confiance des investisseurs vis-à-vis de l'ensemble de la zone. A court terme, l'effet dévaluateur de cette défiance est positif. A moyen terme, il est clair que la situation est intenable. Car soit la crise interne à la zone euro n'est pas surmontée et son éclatement aura des conséquences désastreuses, soit elle est surmontée et la pression haussière de la politique monétaire américaine repartira de manière irrésistible. La seule solution structurelle est de refonder le système monétaire international sur de nouvelles bases. Le G20 vient d'esquisser un timide mouvement en cette direction. Sarkozy et Strauss-Kahn ont la lourde tâche commune de le mener à bien.

Pourquoi l'Allemagne est prise d'une fièvre verte

Entre 20 % et 25 % : telles sont les intentions de vote prêtées par les instituts de sondage, depuis plusieurs semaines, aux Verts allemands. Autant dire qu'ils font, désormais, presque jeu égal avec les sociaux-démocrates. La progression ne laisse pas d'impressionner, depuis les européennes (12,1 %) et les législatives (10,7 %) de 2009. Elle stimule l'appétit de pouvoir des Grünen. « L'année 2011 sera verte ! Nous ne sommes pas modestes ! », a prévenu Claudia Roth, le week-end dernier, au cours du congrès du parti, qui l'a reconduite à la présidence, aux côtés de Cem Özdemir. Aujourd'hui au pouvoir dans quatre Länder, avec les sociaux-démocrates à Brême et en Rhénanie-du-Nord-Westphalie, avec les chrétiens-démocrates à Hambourg, avec la CDU et les libéraux dans la Sarre, les Verts espèrent en conquérir deux l'an prochain. D'après les sondages, Winfried Kretschmann serait en mesure de devenir le Premier ministre-président Verts du pays, dans le prospère Bade-Wurtemberg. Renate Künast, cochef du groupe parlementaire au Bundestag, pourrait ravir la mairie de Berlin au social-démocrate Klaus Wowereit.
Cette popularité inédite s'explique en partie par la configuration actuelle de l'échiquier politique allemand. La démocratie chrétienne a de plus en plus de mal à définir son identité. La social-démocratie est toujours plombée par l'héritage Schröder et sa participation à la grande coalition (2005-2009). Les libéraux, qui ont raté leur retour au pouvoir, l'an dernier, se sont effondrés dans les sondages. Les Verts, dans l'opposition depuis cinq ans, ont finalement le beau rôle. La décision du cabinet Merkel, en septembre, d'allonger la durée de vie des centrales nucléaires, a permis de remobiliser les militants historiques, farouchement antiatome. Toute une série d'initiatives populaires contre de grands projets d'infrastructures, comme la gare de Stuttgart, ont augmenté le pouvoir d'attraction des Grünen. Beaucoup de leurs thèmes de prédilection sont désormais partagés par de larges franges de l'électorat. Leur succès s'inscrit, selon Frank Baasner, directeur de l'Institut franco-allemand de Ludwigsburg, « dans une tendance lourde, depuis plusieurs années, dans l'électorat urbain, diplômé, aisé, vers un parti qui traite des sujets de l'avenir : comment développer nos sociétés de consommation dans un sens soutenable ? ». L'opération de séduction fonctionne d'autant mieux au centre droit que les Grünen ont développé une compétence économique, dans l'idée d'orienter le modèle exportateur le plus possible vers les technologies environnementales.
Mais les sondages actuels s'expliquent aussi par des raisons structurelles. Claude Turmes, eurodéputé Verts luxembourgeois, souligne le rôle joué par « la décentralisation du pouvoir politique en Allemagne, avec beaucoup de compétences réservées aux communes ou aux Länder, et le système électoral allemand, dans lequel la proportionnelle a permis aux Grünen d'entrer au Bundestag dès 1983 ». D'où, selon Daniel Boy du Cevipof, « une institutionnalisation et une professionnalisation plus précoces qu'en France par exemple ». Au pouvoir avec les sociaux-démocrates de 1998 à 2005, les Verts ont ainsi démontré, selon Thomas Klau de l'European Center on Foreign Relations, « leur compétence et leur sérieux, leur capacité à gouverner. Ils disposent d'un éventail large de personnalités qui permet de répondre à des sensibilités différentes, sans les guerres intestines qui minent des partis comme le PS français. Une partie du succès actuel des Verts tient aussi à leur capacité à penser le cadre européen et à apporter des réponses transfrontalières aux grands défis que nos sociétés doivent affronter, au moment où les solutions nationales sont clairement inopérantes ».
Leur bonne fortune du moment vat-elle durer ? Rien n'est moins sûr et les leaders du parti appellent d'ailleurs à ne pas céder à l'euphorie. Rien ne dit que les intentions de vote se concrétiseront dans l'isoloir. L'électorat allemand se caractérise par une volatilité croissante. Et l'état-major n'est pas toujours en phase avec la base. Les délégués du parti ont réservé une bien mauvaise surprise à Claudia Roth, le week-end dernier, en rejetant majoritairement la candidature de la ville de Munich aux JO d'hiver de 2018. Or la présidente, qui était impliquée dans le projet, voulait précisément utiliser le dossier pour démontrer que les Verts n'étaient pas systématiquement le « parti contre » les nouveaux projets d'infrastructures (« Dagegen-Partei »).
Autre question : alors que les Verts français viennent de fusionner avec Europe Ecologie, peut-on attendre une « poussée verte » dans l'Hexagone comme on en observe, aussi, au Danemark, en Wallonie ? Pour Rebecca Harms, eurodéputée verte allemande, « à regarder le résultat des européennes, 16,2 %, le potentiel n'est pas plus faible qu'en Allemagne. Mais reste à savoir comment l'exploiter ». Or le nouveau parti pourrait se révéler difficile à manoeuvrer. « Les militants des Verts sont très ancrés à gauche, voire à l'extrême gauche, alors que ceux d'Europe Ecologie sont plus hétéroclites, rappelle Daniel Boy. En outre, le contexte institutionnel français est moins favorable. A la présidentielle de 2012, je doute qu'ils réalisent plus de 6 ou 7 %, or c'est à cette aune-là que se feront les négociations avec les socialistes pour les législatives. Europe Ecologie-Les Verts ne devrait donc pas pouvoir compter sur un très grand nombre de sièges à l'Assemblée. » Les perspectives semblent meilleures au niveau européen. Thomas Klau assure qu' « il y aura progressivement une prise de conscience, par les citoyens, de l'importance du Parlement européen dans la politique de l'UE. Il est très clair que les Verts, par leur idéologie, leur culture, leur pensée, sont les mieux à même de se servir de ce nouvel instrument de pouvoir ».

Fillon V : les partenaires sociaux prêts à négocier entre eux

Dans un contexte de rigueur, syndicats et patronat doutent des marges d'action de l'exécutif et se préparent à relancer eux-mêmes le dialogue social.

« Cette semaine et compte tenu de la crise irlandaise, le plus important serait de rappeler l'engagement européen de la France », estime la présidente du Medef. « Nous comptons sur le Premier ministre pour que la France pèse de tout son poids pour une vraie réforme de la gouvernance économique de l'Europe ». Au-delà, le Medef juge, au nom de la compétitivité, qu'il « convient à la fois de réduire les déficits et la dette en travaillant sur les dépenses publiques et en poursuivant sans relâche la RGPP ». Pour l'organisation patronale, « il est temps de réfléchir sur le financement de la protection sociale » et d'engager le débat fiscal : « Pour alléger le coût du travail, faut-il ou non taxer davantage la consommation ? Les émissions de CO2 ? », questionne Laurence Parisot. En matière de dialogue social, « un espace semble s'ouvrir pour que nous nous mettions d'accord sur un agenda social. Si cela se confirme, il faudra que l'Etat nous laisse travailler entre nous ».
« Nous attendons des réformes structurelles qui ne coûtent rien », explique la CGPME. Par exemple : « Comment décomplexifier la situation des entreprises ? » « Nous savons que nous sommes dans un contexte budgétairement contraint, nous n'osons donc pas redemander des mesures comme un taux d'impôt sur les sociétés réduit pour les bénéfices réinvestis », poursuit Jean-François Roubaud. Concernant le dialogue social, « que l'Etat ne se mette pas trop en travers des discussions entre partenaires sociaux », demande aussi la CGPME, qui, par ailleurs, temporise : « Nous n'avons pas d'obligation de résultat dans les semaines qui viennent. »
« Compte tenu de la situation budgétaire et de l'état du pays, avançons au rythme de ce qu'on peut se payer : une politique sur l'emploi des jeunes et des seniors, mais pas une politique de réindustrialisation », recommandent les artisans, inquiets de la situation des collectivités territoriales. « Elles sont à court de ressources, or beaucoup de nos emplois dépendent de leurs investissements », explique Jean Lardin. Après le conflit sur les retraites, « si le gouvernement veut mettre une goutte d'huile ou donner un coup d'accélérateur dans les discussions entre partenaires sociaux, pourquoi pas, mais le dialogue social est notre affaire », prévient-il.
« Le conflit sur les retraites a montré un sentiment très fort d'injustice. Or, un des moyens de réduire les inégalités, c'est une grande réforme fiscale. C'est comme cela qu'on pourra dégager des moyens  », a insisté hier Jean-Claude Mailly sur BFM. Il demande « la réévaluation » de l'ensemble des exonérations de cotisations patronales et des aides fiscales accordées aux entreprises. « Cela fait 140 milliards d'euros, d'après la Cour des comptes. Ce n'est pas rien ! Il faut regarder si on peut mieux les réaffecter. » Il souligne en outre que la suppression de l'ISF et du bouclier fiscal ne lui semble « pas aller dans le bon sens ». « Commençons par remettre sur pied un vrai impôt sur le revenu, plus progressif et vraiment payé par tous », défend-il.
Le discours de François Fillon ? « Pas de commentaires », car Bernard Thibault « n'en attend rien », évacue son entourage. L'hommage rendu par Nicolas Sarkozy aux syndicalistes la semaine dernière à la télévision ? « Assez facile dans la mesure où on se fout de leur opinion », a cinglé le leader cégétiste hier sur France 2. Le ton est donné : la CGT ne place aucun espoir dans la politique gouvernementale et se raidit d'autant plus que malgré les craintes exprimées lors du conflit sur les retraites, « le gouvernement, le pouvoir, le chef de l'Etat, font comme s'il ne se passait rien. »
Les syndicats plus réformistes sont eux aussi peu prolixes sur l'évolution de la politique gouvernementale. Dans un contexte de rigueur budgétaire, leurs regards se tournent vers le patronat. François Chérèque avait donné le ton dans la foulée de l'intervention télévisée de Nicolas Sarkozy : « Le président ne tire aucune leçon de la situation économique et sociale […] Preuve est faite que maintenant, c'est aux partenaires sociaux de se saisir des sujets. » Pour Bernard Van Craeynest (CFE-CGC) aussi, « le gouvernement doit arrêter de céder à la tentation de tout contrôler et laisser avancer les partenaires sociaux. »